Méditation végétale

                           

        Vous êtes vous déjà posé dans l'herbe, avec aucun autre projet que de profiter de l'instant.
Avez-vous déjà gouté à la caresse de l'inaction solitaire. Vous rendre enfin disponible pour le concert symphonique des oiseaux ou le lent murmure des cigales dispendieuses ; attentif au bruissement du vent, qui fait chanter des racines à la cime les arbres, les branches et les feuilles ; préoccupé par le flot incessant d'une colonie de fourmis affairées à transporter les éléments nécessaires à la subsistance des leurs.Il ne s'agit pas seulement de ne rien faire, mais juste décider de faire rien.

S'asseoir sur l'herbe c'est déjà faire un effort, l'effort physique de s'abaisser vers la terre, l'effort surhumain de passer de la station debout à la station animale, à trois pattes, puis quatre puis plus du tout. Enfin prendre position sans risquer quoique ce soit. il faut donc être disposé psychologiquement, disponible physiquement, dissocié socialement.
Si l'oisiveté contemplative est regardée de travers dans nos contrées, c'est qu'elle n'est pas productive par définition. Ainsi donc elle ne serait pas productive pour la société des Hommes mais quelle production de sérénité, de connaissance et de maîtrise de soi elle confère à celui qui s'en rend coupable. Ce bien qui s'installe en lui vaut pourtant tous les biens que cet individu pourrait produire tout au long de sa vie.
Parce qu'il faut s'être posé un jour dans l'herbe, puis une autre fois et une autre et un autre, pour comprendre à quel point la proximité des fibres peut agir dans votre esprit comme les fibres alimentaires le font dans vos intestins: relâcher, décongestionner, vidanger, purifier, déboucher.

Se faire spectateur du ballet de la nature, se laisser bercé par les ritournelles des volatiles et des coléoptères, être happé par les parfums voluptueux des plantes aromatiques. Se laisser enlever par ces ravisseurs ravissants est une délicieuse expérience de la vraie liberté.
Enfin seul au milieu des éléments fondamentaux, enfin loin du marasme humain et des mascarades sociétales, élément soi-même en communion avec celle qui nous a fait. Avec celle que l'on défait.

Il n'est pas question ici de juger les actions des Hommes ou de se flageller de ne pas porter plus d'attention à la nature. Il s'agit au contraire de hurler à quel point il est bon de faire rien.

Après quelques minutes, vous percevez encore des pensées prégnantes qui fusent dans votre cortex mais elles glissent bientôt le long de votre nuque pour s'envoler dans l'oubli sur le toboggan de vos omoplates. Si si vous pouvez sentir ce flot libérateur. Au fil du processus d'exfiltration des soucis et questionnements vous fixez votre attention sur l'une des scènes du théâtre thérapeutique qui s'offre sous vos yeux. cette fourmi qui sort du rang, ou ce bourdon qui se gorge de pollen avant d'aller féconder des milliers de belles des champs. Sinon ce petit ruisseau dont le murmure s'était fait si discret alors qu'il apporte la vie à la plupart des acteurs.
Visualisez vos pensées glisser lentement le long du petit cours d'eau et oubliez les.

L'écoute attentive des sons, des vibrations, des ondes de la faune et de la flore emplit désormais votre esprit d'une ordonnance protéiforme pour le patient qui sommeil en vous. Vous vibrez avec l'environnement, vous êtes cet environnement et le bain de nature se transforme en cure de désintoxication, le fracas des paroles a fait place au soin des maux, le relent de l'insatisfaction fait place à la contemplation d'une pensée.

Si vous relâcher votre esprit et votre corps, que tous vos sens sont en éveil sous le charme de ce moment volé, vous accédez à l'échange symbiotique entre les vibrations de la terre et celles de votre corps, issus de la même énergie.
Si vous cherchez bien c'est à dire si vous ne cherchez pas vous découvrirez que les plus grandes richesses de ce monde sont en vous.